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Édito de la lettre d’information du 3 octobre 2022

Le jour de publication de cette lettre correspond à la reprise de la session ordinaire des deux assemblées. La trêve estivale n’a pas apporté l’insouciance habituelle de cette période de l’année. À peine sortis (le sommes-nous vraiment ?) des inquiétudes de la pandémie, alors que la guerre en Ukraine persiste et s’amplifie, les Français  sont confrontés à un niveau d’inflation disparu depuis plus de trente ans.

L’ordre du jour du début de cette session appelle des textes importants par leurs conséquences ou par leur valeur symbolique. Outre le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), mis en avant par les médias car il pouvait comporter un article sur l’allongement de la durée de cotisation retraite, et le Projet de loi de finances (PLF), des débats, parfois houleux n’en doutons pas, sont prévus sur la Loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (LOPMI) et sur le projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi. Ces deux derniers textes ont été inscrits par le gouvernement en procédure accélérée. Devenue malheureusement la règle, cette modalité qui supprime la navette entre les deux chambres du Parlement présente l’avantage de la rapidité mais ne donne pas un temps suffisant pour une étude qualitative de textes pourtant complexes. Suivra ensuite la très politique et controversée proposition de loi constitutionnelle visant à protéger et à garantir le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception. Puis, ultérieurement, devraient arriver en débat le projet de loi sur la réforme des retraites, celui sur la fin de vie et  enfin sur l’immigration.

Plus que jamais, le budget sera un moment fort en raison du contexte économique. La pression médiatique et celle de la rue vont très certainement s’amplifier afin que les boucliers persistent et se multiplient. D’ores et déjà, on imagine mal la fin de la remise de 30 centimes sur les carburants qui doit être levée à partir du 1er novembre.

En faveur des collectivités territoriales, les premières annonces promettent l’inscription de près d’un demi-milliard d’euros pour faire face à la flambée du prix de l’énergie. Toutefois, il n’est pas excessif d’estimer que ce budget supplémentaire est insuffisant compte tenu de la hausse incessante des tarifs, qui grève de nombreux budgets communaux. Alors même que différents dispositifs gouvernementaux dans le domaine de la transition énergétique sont maintenus, mais, communication oblige, recyclés sous un autre nom, il sera difficile pour des collectivités exsangues d’investir, faute de pouvoir dégager un autofinancement suffisant.

La logique voudrait, et c’est ce que je défendrai lors des débats, que les collectivités soient mieux accompagnées, car de leur capacité à investir dépend la survie de nombreuses entreprises de nos territoires dont les artisans. C’est par le maintien de la croissance que cette période pourra être traversée sans trop de dommages. Soutenir le tissu économique local est donc essentiel et cela passe par la préservation des capacités d’investissement des collectivités territoriales. Par ailleurs, nos concitoyens privés de vie associative pendant les années Covid ont besoin de retrouver des activités souvent hébergées dans des bâtiments municipaux. La fermeture des salles polyvalentes, gymnases et autres centres culturels pour cause d’impossibilité de les éclairer et de les chauffer va finir par désespérer les habitants de nos communes en mal de vie sociale.

La conjoncture économique mondiale, plutôt favorable avant la crise sanitaire, a permis durant celle-ci un soutien fort de l’État français à l’égard de ses entreprises. Mais, sur fond de guerre en Europe, elle s’est dégradée en à peine un semestre. L’inflation galopante et la remontée forte des taux d’intérêt en sont les conséquences. L’endettement de la France, qui résulte de l’inaction des différentes majorités, nous place aujourd’hui dans une situation très fragile. François Fillon déclarait en septembre 2007 : « Je suis à la tête d’un État qui est en situation de faillite sur le plan financier, je suis à la tête d’un État qui est depuis quinze ans en déficit chronique, je suis à la tête d’un État qui n’a jamais voté un budget en équilibre depuis vingt-cinq ans. Ça ne peut pas durer ! » C’était  il y a quinze ans, et la dette publique représentait alors 64,2% du PIB. Elle est d’environ 114,5% aujourd’hui. Le président de la République, qui a largement sa part de responsabilité, car le déficit et donc la dette ont continué à croître avant la crise Covid, et qu’il est l’un des rouages principaux de l’État depuis onze ans, se trouve aujourd’hui de plus en plus enfermé dans une situation inextricable. Il est en effet impossible de conjuguer la fin, pourtant indispensable, du « quoi qu’il en coûte » et le soutien, tout aussi indispensable, de certaines catégories.

C’est cette quadrature du cercle que va devoir résoudre la Première ministre, Élisabeth Borne, dans les deux prochains mois.