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Édito de la lettre électronique du 5 mars 2024

Diversions…

Après de nombreuses consultations, et bien des hésitations, Hugues Saury et moi-même avons décidé de valider la constitutionnalisation de l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG), une première mondiale, destinée à, si l’on en croit la presse, permettre à Emmanuel Macron de laisser son nom dans l’Histoire.
Comme aucun parti ne manifeste son intention de remettre en cause la législation sur l’IVG et que le Garde des Sceaux, lui-même, proclame « urbi et orbi » que l’inscription de l’IVG dans la Constitution « ne rend absolument pas caduque la clause de conscience des professionnels de santé » refusant de pratiquer cette intervention, on ne voit pas très bien ce qui justifie cette initiative présidentielle, sinon – outre son ego –  des considérations électorales.
De fait, sous le fallacieux prétexte de se prémunir contre un risque de voir ce droit, acquis depuis bientôt un demi-siècle, entravé par une majorité qui lui serait hostile, il est inscrit dans le texte fondateur de la Vème République. (Comme si cette nouvelle majorité fantasmée ne pourrait pas corriger la Constitution dans le sens inverse).
En réalité, derrière cette réforme superflue et à quatre mois d’une importante consultation électorale, il s’agissait de forcer les parlementaires à se positionner, non sur la constitutionnalisation d’un droit mais sur le principe même de l’IVG, qui est affaire de choix personnel, en créant, par voie de manipulation médiatique, un climat de tension des plus artificiels.
Lors du Congrès de Versailles, le triomphalisme manifesté par certaines parlementaires persuadées de sortir victorieuses d’une bataille qui n’avait pas d’adversaire, allait dans le même sens et nous nous félicitons de n’être pas tombés dans le piège politicien qui nous était tendu…
La vraie question que nous devons nous poser, en tant que parlementaires et citoyens, est celle de l’accompagnement de ces femmes confrontées à une difficile et toujours douloureuse décision, ce qui était au cœur de l’exposé des motifs de la Loi Veil.
Nous sommes en présence d’une opération de diversion, visant à détourner l’attention des médias et de l’opinion sur les vrais problèmes du pays, et pas seulement ceux des agriculteurs dont on ne parle plus, une fois refermées les portes du Salon, mais aussi, du pouvoir d’achat, de l’immigration incontrôlée, de l’endettement explosif, de la désertification des campagnes et des déficits colossaux qui affectent le budget de l’État et la balance commerciale de la France.

Diversion aussi, la communication jupitérienne et unilatérale sur un éventuel envoi de troupes en Ukraine …

Il nous appartient, à nous, représentants de cette majorité silencieuse, qui peine à joindre les deux bouts, qui n’a plus de médecin, qui vit dans l’insécurité, dans tous les sens du mot, de prendre en compte ces ressentiments et ces espoirs toujours déçus, face à un pouvoir central qui prend ses décisions sur le coup de l’émotion et s’imagine qu’un pays se gère par l’usage répétitif de débats sans issue, avouant implicitement par là-même son impuissance…

Enfin, plus prosaïquement, il nous faut aussi balayer devant notre porte : la sacro-sainte simplification des procédures dont on clame, depuis trente ans la nécessité, ne concerne pas seulement les administrations publiques centralisées ou déconcentrées. Certains parlementaires excellent dans l’art de superposer des propositions de loi ou des amendements sur des points, sinon futiles, du moins annexes qui ont pour effet de rendre illisible le travail de fond effectué au sein des deux chambres.
Les batailles à mener sont donc nombreuses et leur issue est toujours et, jusqu’au dernier moment, incertaine. Nous ferons donc nôtre, cette formule de M. Winston Churchill : « Le succès n’est pas final, l’échec n’est pas fatal. C’est le courage de continuer qui compte »
A bientôt.

Pauline Martin, sénatrice du Loiret
Le 5 mars 2024